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10 avril 2007 2 10 /04 /avril /2007 11:20

La paranoïa (du grec παρά pará « à côté » et νοῦς noûs « esprit ») est au sens premier une maladie mentale chronique du groupe des psychoses, qui comprend un délire d'un type particulier dit délire paranoïaque.

La paranoïa peut s'expliquer comme étant un délire dans lequel le sujet a constamment l'impression d'être trahi, agressé ou mis en danger voire manipulé. Le sujet se méfie donc, la plupart du temps inutilement, de tout le monde, il va jusqu'à se méfier de son entourage, il a l'impression que tous complotent contre lui.

On parle de psychose paranoïaque. Ce délire est organisé. On dit qu'il est structuré ou aussi on le dit en "secteur". Il faut en distinguer le caractère et la personnalité paranoïaque qui correspondent à un certain type de personnalité ou de caractère, mais dans lequel il n'y a pas de délire. En français, l'adjectif qui correspond à paranoïa est paranoïaque. Le terme paranoïde possède une signification assez différente qui correspond au délire observé dans les schizophrénies notamment, le délire y est désorganisé, mal structuré, "en réseau" plus diffus (il peut également qualifier un trait de caractère ou de personnalité).

Sommaire

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La personnalité paranoïaque

Par un raccourci simplificateur, on peut considérer la paranoïa comme résultant de mécanismes de défense et de protection de l'intégrité psychique de l'individu (et par exemple selon une terminologie psychanalytique dans le cas de la psychose paranoïaque : clivage, projection, identification projective...). Nous sommes tous susceptibles d'être un peu "paranos" (au sens commun). Ceci nous permet de ne pas être complètement perméables aux opinions d'autrui, de construire notre propre personnalité, éventuellement de tenir tête et de développer une pensée originale. Mais nous gardons une capacité à modifier et à réviser notre jugement en fonction des apports des autres, de notre milieu ; en quelque sorte une capacité à transiger et à faire des compromis avec l'extérieur (ce qui par analogie peut évoquer dans un tout autre cadre de référence la rétropropagation du gradient) mais le réajustement ne permet pas de comprendre le fait paranoïaque. En effet, par un autre raccourci on pourrait dire que les sujets paranoïaques sont très soucieux de se conformer à un ordre symbolique qui leur échappe. Ils s'épuisent en quelque sorte à se conformer à leur environnement, mais n'y parvenant pas ils vont constituer une solution délirante pour lutter contre l'effondrement psychique qui les guette. C'est ainsi que dans certaines circonstances et chez certains individus qui ont parfois développé des capacités de raisonnement élevées, ce système dérape et la paranoïa devient franchement pathologique. Le délire paranoïaque s'installe de façon structurée et progressive selon un ordre bien spécifique, une forme de cohérence, et une clarté souvent communiquable, de telle sorte que l'entourage peut parfois s'associer au délire. Enfin de façon également élliptique on relève la place essentielle occupée par les troubles de l'identité sexuelle clivés et par la non-reconnaissance radicale (déni) de l'homosexualité dans la vie affective du sujet si on se place d'un point de vue psychodynamique.

D'un point de vue sémiologique les personnalités paranoïaques se caractérisent par quatre traits fondamentaux qui entraînent à terme une inadaptabilité sociale :

  1. la surestimation pathologique de soi-même ;
  2. la méfiance extrême à l'égard des autres ;
  3. la susceptibilité démesurée ;
  4. la fausseté du jugement ;
  5.  

 

La psychose paranoïaque, la paranoïa

L'hypothèse est que la paranoïa trouve sa source sur une blessure narcissique précoce (lors des premières interactions entre un sujet, plus ou moins fragile et son milieu plus ou moins capable de le rendre encore plus vulnérable). Les premières identifications sont défaillantes et le trouble de la personnalité progresse souvent de manière latente jusqu'à l'adolescence. La maladie peut alors être activée lors d'événements de vie subjectivement difficiles jusqu'à faire parfois de certains individus, du fait de l'isolement affectif et relationnel qui en découle, de véritables "bombes psychiques". Ceci risque de les conduire à des comportements agressifs ou dangereux. L'ensemble des troubles peuvent provoquer des réactions hétéro-(formes sthéniques) ou auto-agressives(sensitivité, formes asthéniques) et aboutir à un état délirant. Ainsi, dangerosité et délire peuvent être plus particulièrement associés dans ce contexte clinique dont on notera les fréquentes implications médico-légales dans sa composante sthénique et passionnelle. Le délire peut se porter sur le corps propre (hypochondrie délirante, ce qui pose des questions de diagnostics différentiels avec les mélancolies, mélancolies d'involution, syndrômes de Cottard).

On peut distinguer plusieurs états délirants dans la psychose paranoïaque constituée :

L'étude de ces quatre symptômes au cours de l'histoire montre que des formes d'organisations d'allure paranoïaque peuvent par périodes affecter des groupes humains (organisations totalitaires notamment). Ainsi, comme il met en jeu l'environement, le contexte, dans ses rapports avec une personnalité, le diagnostic est suspect quand il est posé dans un tel contexte totalitaire : Alexandre Soljenitsyne fut ainsi traité de paranoïaque par les autorités de son pays.

Sur le plan historique et nosographique, par leurs travaux, Emil Kraepelin, Paul Sérieux et Joseph Capgras ont décrit des tableaux cliniques que l'on peut rattacher à la conception actuelle de la psychose paranoïaque, en tâchant de se différencier de ces auteurs, Kretschmer va décrire une personnalité dite sensitive, susceptible de s'apparenter à la personnalité paranoïaque. Enfin, on relèvera l'importance des rapports entre paranoïa et délire érotomaniaque d'une part et, d'autre part, entre paranoïa et certaines formes obsessionnelle d'allure névrotique.

En somme on est ici sur un pôle marqué par la structuration, la consistance, l'ordre, où les formations réactionnelles dominent dans le rapport à l'objet primitif en partant du plus élaboré au plus archaïque : névrose obsessionnelle, mélancolie, paranoïa, à l'opposé de la nébuleuse transnosographique représentée par l'hystérie, les manies, les schizophrénies et certains états limites s'ils se situaient du côté du "désordre", de la dilacération pulsionnelle violente dans la forme la plus archaïque.

Prise en charge

La question des soins est extrêmement délicate. Le délire paranoïaque installé est un délire systématisé pris dans le caractère et la construction même de la personnalité. Souvent toute proposition de soins est interprétée comme une agression. Aussi le pronostic évolutif est-il très fréquemment fâcheux. La prise en charge est rarement possible en cabinet, souvent elle est institutionnelle, elle fait appel à une approche psychothérapeutique, chimiothérapeutique (neuroleptiques peu efficaces sur les interprétations, mais aussi parfois associé à des antidépresseurs et anxiolytiques) et bien sûr institutionnelle.

Pour protéger l'environnement et le malade, il est parfois nécessaire de recourir à une hospitalisation sous contrainte, ce qui permet à l'entourage ou à l'état (préfet) d'initier une prise en charge par le soin psychiatrique du patient. Ainsi le malade atteint de délire paranoïaque peut être pris en charge par une équipe soignante pluridisciplinaire. Ce qui autorise parfois un apaisement et une stabilisation satisfaisante des troubles si une relation thérapeutique parvient à être ébauchée. Bien sûr, compte tenu du déni des troubles qui accompagne cette affection, bon nombre de personnes qui en sont atteintes restent sans suivi.

Bibliographie

  • Sigmund Freud, Remarques psychanalytiques sur l’autobiographie d’un cas de paranoïa (dementia paranoïdes). Le président Schreber, 1911, G. W. VIII, dans Cinq psychanalyses, PUF, Paris, 20e. édition, 1997, pp. 263-324.
  • Sigmund Freud, Communication d’un cas de paranoïa en contradiction avec la théorie psychanalytique (1915), traduit par D. Guérineau, dans S. Freud, Névrose, Psychose et perversion, PUF, Paris, 12e. édition 2002, pp. 209-218.
  • Quentin Debray, L'idéalisme passionné, PUF, Paris, 1989, ISBN 2-13-042160-1
  • Jacques Lacan, De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité, éd. du Seuil, Paris, 1975 (1932)
  • Jacques Lacan, Écrits, éd. Seuil, Paris, 1966.
  • Jacques Lacan, Séminaire, Livre III, Les psychoses (1955-1956), éd. Seuil, Paris, 1981
  • Gaëtan Gatian de Clérambault, Les délires passionnels : érotomanie, revendication, jalousie (présentation de malades), Bull. Soc. Cl. Ment., février 1921, p. 61, et dans OEuvres Psychiatriques, Frénésie Édition, Paris, 1987, pp. 315-322.
  • Gaëtan Gatian de Clérambault, Érotomanie pure, érotomanie associé (présentation de malade), Bull. Soc. Cl. Ment., juillet 1921, p. 230, et dans OEuvres Psychiatriques, Frénésie Édition, Paris, 1987, pp. 352-355.
  • Paul Sérieux et Joseph Capgras, Les folies raisonnantes. Les délires d’interprétations, éd. Alcan, Paris, 1902.
  • Paul Serieux et Joseph Capgras, Délires systématisés choniques. Traité de Sergent, Psychiatrie, t. 1, éd. Maloine, Paris, 1926.
  • A. Sims & A. White, Coexistence of the Capgras and De Clerambault syndromes a case report, British Journal of Psychiatry, 1973, 123, p. 653-657.
  • Ernst Kretschmer, Paranoïa et sensibilité, Imago Mundi, G. Monfort éditeur, 1918, 293 p.

Voir aussi

Trouble de la personnalité paranoïaque

 

 

 

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